TOURNIER Jacques - Le dernier des Mozart (p.22-23)
....‑ Un soir, sur la terrasse. Ils
s'attardent parce qu'il fait beau et boivent du vin d'orange en attendant M.
von Baroni‑Cavalcabo. Dans le jardin, Julie s'amuse avec son chien.
‑ Mon père possédait deux pianos, dit brusquement François‑Xavier. Un pianoforte et un clavicorde. Quand ma mère est partie ?ourle Danemark, elle nous a confié la garde Je ces reliques. Le pianoforte est chez mon Frère Carl, à Milan. Moi, j'ai reçu le clavicorde. Il n'avait pas sa place à Podkamen et à Sarki. je l'avais donc laissé à Vienne, au garde‑meubles. Maintenant que j'ai un appartement, j'ai pu le faire venir. Il est arrivé hier. C'est un instrument de Walter, le célèbre facteur de Vienne. Mon père s'en servait pour composer.
C'est la première fois qu'elle l'entend parler de son père. jusqu'ici, lorsqu'on l'interrogeait, il se contentait de répondre : « je ne connais que sa musique, le seul souvenir qu'il m'ait laissé. » Avec une agressivité qu'elle avait découverte elle‑même l'année précédente, lorsqu'ils établissaient ensemble le programme de, son concert. L'arrivée de ce clavicorde semble ouvrir une brèche. Elle se risque à demander:
‑ Pourquoi n'avait‑il pas sa place à Podkamen ?
‑ Il représentait tout ce que je fuyais.
‑ Mon mari avait donc raison, lors de notre premier dîner, lorsqu'il parlait d'exil ?
‑ J'avais besoin de faire le vide pour établir un code de conduite. je veux dire : quelques lois qui m'éviteraient d'être blessé. J'ai mis toutes ces années à les approfondir.
Il se lève pour remplir son verre et, comme pour lui‑même
‑ Article un ne plus jamais chercher son crâne. Article deux : reprendre mon prénom. Article trois : écrire ce que je peux comme le peux. Article quatre : ne jamais penser qu'il écoute et qu'il juge.
Il s'approche de la balustrade comme pour suivre les jeux du chien. Lorsqu'il se retourne, elle découvre un autre visage, dix ans de moins, presque un enfant...
‑ Mon père possédait deux pianos, dit brusquement François‑Xavier. Un pianoforte et un clavicorde. Quand ma mère est partie ?ourle Danemark, elle nous a confié la garde Je ces reliques. Le pianoforte est chez mon Frère Carl, à Milan. Moi, j'ai reçu le clavicorde. Il n'avait pas sa place à Podkamen et à Sarki. je l'avais donc laissé à Vienne, au garde‑meubles. Maintenant que j'ai un appartement, j'ai pu le faire venir. Il est arrivé hier. C'est un instrument de Walter, le célèbre facteur de Vienne. Mon père s'en servait pour composer.
C'est la première fois qu'elle l'entend parler de son père. jusqu'ici, lorsqu'on l'interrogeait, il se contentait de répondre : « je ne connais que sa musique, le seul souvenir qu'il m'ait laissé. » Avec une agressivité qu'elle avait découverte elle‑même l'année précédente, lorsqu'ils établissaient ensemble le programme de, son concert. L'arrivée de ce clavicorde semble ouvrir une brèche. Elle se risque à demander:
‑ Pourquoi n'avait‑il pas sa place à Podkamen ?
‑ Il représentait tout ce que je fuyais.
‑ Mon mari avait donc raison, lors de notre premier dîner, lorsqu'il parlait d'exil ?
‑ J'avais besoin de faire le vide pour établir un code de conduite. je veux dire : quelques lois qui m'éviteraient d'être blessé. J'ai mis toutes ces années à les approfondir.
Il se lève pour remplir son verre et, comme pour lui‑même
‑ Article un ne plus jamais chercher son crâne. Article deux : reprendre mon prénom. Article trois : écrire ce que je peux comme le peux. Article quatre : ne jamais penser qu'il écoute et qu'il juge.
Il s'approche de la balustrade comme pour suivre les jeux du chien. Lorsqu'il se retourne, elle découvre un autre visage, dix ans de moins, presque un enfant...