BURGESS Anthony - Meurtre en musique (p.339)
...-- « Le jeune monarque suscite beaucoup de sympathie, dit
Holmes, spécialement ici. Mais il a des ennemis, républicains et anarchistes.
L’Espagne connaît une grande turbulence politique. Qui se reflète même dans la
musique espagnole contemporaine ». Il regarda son violon, qui reposait
dans son étui en attente de son maître, et frotta amoureusement l’archet avec
de la résine. « Ces sons pétulants que serinait un petit violon jour et
nuit au Maroc, Watson, j’éprouve le besoin de les extirper de ma tête par
quelque chose de plus élaboré et de plus civilisé. Une seule corde et en
général une note pour une corde. Rien à voir avec l’excellent Sarasate. ».
Il se mit à jouer un air qu’il m’assura être espagnol, bien que je crusse y déceler
quelque chose de l’héritage maure, un air lointain, empreint de lamentations et
de désolation. Soudain, Holmes sursauta
et consulta sa montre oignon, cadeau du duc de Northumberland. « Ciel,
nous allons être en retard, Sarasate joue cet après-midi au St James
Hall. »
Il ôta son turban et sa robe de chambre et se dirigea vers son cabinet de toilette pour se vêtir d'une façon plus conforme à une sortie londonienne. Je gardai pour moi mes remarques, comme toujours, sur ce que je pensais de Sarasate et, pour tout dire, de la musique en général. Le flair artistique de Holmes me faisait défaut. Quant à Sarasate, je ne pouvais nier qu'il jouait merveilleusement bien pour un étranger, mais il y avait dans le maintien de cet homme une suffisance que je trouvais singulièrement peu attirante.....