QUIGNARD Pascal - Terrasse à Rome(p.58)
... Madame de Pont‑Carré jouait bien du
luth. Même, on faisait porter son luth au parloir afin que l'évêque de Langres
pût l'entendre jouer. Son jeu était plein de tristesse, d'âpreté anglaise, de
lenteur, de fierté. Elle accompagnait au luth ou au théorbe Monsieur de Sainte
Colombe dans les concerts privés qu'il donnait dans sa maison sur la Bièvre.
Elle aimait aussi les livres. Son jugement était indépendant, sa dévotion
presque républicaine. Elle fut la toute première à avoir donné une somme de
plusieurs milliers de livres pour faire bâtir à Port‑Royal des Champs, dans la
campagne sauvage et la bordure de la forêt qui se trouve près de Versailles, un
nouveau bâtiment où les femmes pussent se retirer à l'abri des hommes. Elle y
eut le plus beau logement, donnant directement sur la galerie des parloirs,
dont un grand salon peint de camaïeu. Elle eut un oratoire distinct de la pièce
où elle mit son bureau. Elle fit une longue terrasse devant les fenêtres de sa
chambre à coucher où elle fit disposer soixante caisses d'orangers. Madame de
Pont‑Carré était généreuse. Elle donnait asile aux jansénistes, aux
Républicains, aux tyrannicides que les compagnies d'archers recherchaient, aux
Juifs, aux Puritains. Elle ouvrait les bras à tout ce qui était persécuté.
Meaume le Graveur et Abraham Van Bercheni se rendirent à l'hôtel parisien de Madame de Pont‑Carré qui était situé rue des Mauvaises‑Paroles.
Ils attendirent le célèbre violiste qui leur avait donné rendez‑vous dans ce logis mais il ne vint pas.
Meaume le Graveur et Abraham Van Bercheni se rendirent à l'hôtel parisien de Madame de Pont‑Carré qui était situé rue des Mauvaises‑Paroles.
Ils attendirent le célèbre violiste qui leur avait donné rendez‑vous dans ce logis mais il ne vint pas.