JAN OTTEN Willem - Un homme par ouï-dire (p.17)
... Le bout de mes doigts, voilà ce qui me manque le plus. J'attribue cela à une impression qui fut la mienne, disons dans les deux années qui ont suivi ma mort, celle d'avoir encore des mains - quotidiennement pour ainsi dire entre dix heures du matin et midi et demi. Une sensation assidue que me procuraient certains de mes proches - pour la plupart mes élèves et en tout premier lieu Johannes, mon aîné. J'avais plaisir à constater qu'il étudiait avec acharnement. Plaisir accru par le fait qu'il a hérité de mon vieux Pleyel - une vraie jouissance (le mot n'est pas trop fort car, chaque matin, le désir qui m'habitait d'entendre les études pour le piano était comparable à celui que peut susciter un corps) : le même toucher, un rien plus clair que celui du Steinway sur lequel il joue à présent, et fait pour jouer Bach selon ma manière - martelée, incisive, sans les pédales...