BOREL Vincent - Baptiste (p.28-29)
…Pour tout héritage, Salomone avait laissé à Bonaventure
quelques manuscrits qu’il avait pu sauver de sa bibliothèque mantouane au
moment où les Juifs avaient été bannis de la ville. Avec ces pages, j’entrai
plus avant dans l’art violonistique en pratiquant Biagio Marini, Marco Uccellini,
Andrea Falconieri, auteurs qui sont la gloire de Venise, de Parme et de Naples.
La sonate d’église et celle de chambre, le style réglé et le fantastique, le difforme et le glissé, le tremblant et le piqué, le coup d’archet qui imite la lyre, la trompette, la guitare et même la castagnette, j’avalais tout, voulais tout connaître, tout jouer, tout posséder.
Autant j’aimais à faire tomber de la guitare les gouttes sonores et chercher en ses chœurs des plaintes brisées, autant le violon m’emplit encore d’une fureur que j’ai peine à dominer. Il me commande plus que je ne le dirige, il m’échauffe et je puis passer trois heures avec lui pour ne le quitter qu’à regret.
Alors, les mains toutes collantes du sucre, du miel et du blanc d’œuf dont on l’enduit pour l’assouplir, l’odeur de ses résines orientales que la sueur sublime m’emplissant le nez, ses vibrations courant encore sous ma peau jusque dans mes os, c’est toute son âme résonante qui m’imprègne d’une permanente ivresse.
Je commençai à commettre cent extravagances de ma façon, gigues, gaillardes, caprices, pavanes, attrapant dans la rue ces airs que le populaire chante et qui m’enchantent, habitude d’oreille que j’ai depuis gardée. Car la bonne musique ne s’invente pas, je jurerais plutôt qu’elle s’écoute dans l’air qui passe puis se distille en notre esprit, comme à notre insu….
La sonate d’église et celle de chambre, le style réglé et le fantastique, le difforme et le glissé, le tremblant et le piqué, le coup d’archet qui imite la lyre, la trompette, la guitare et même la castagnette, j’avalais tout, voulais tout connaître, tout jouer, tout posséder.
Autant j’aimais à faire tomber de la guitare les gouttes sonores et chercher en ses chœurs des plaintes brisées, autant le violon m’emplit encore d’une fureur que j’ai peine à dominer. Il me commande plus que je ne le dirige, il m’échauffe et je puis passer trois heures avec lui pour ne le quitter qu’à regret.
Alors, les mains toutes collantes du sucre, du miel et du blanc d’œuf dont on l’enduit pour l’assouplir, l’odeur de ses résines orientales que la sueur sublime m’emplissant le nez, ses vibrations courant encore sous ma peau jusque dans mes os, c’est toute son âme résonante qui m’imprègne d’une permanente ivresse.
Je commençai à commettre cent extravagances de ma façon, gigues, gaillardes, caprices, pavanes, attrapant dans la rue ces airs que le populaire chante et qui m’enchantent, habitude d’oreille que j’ai depuis gardée. Car la bonne musique ne s’invente pas, je jurerais plutôt qu’elle s’écoute dans l’air qui passe puis se distille en notre esprit, comme à notre insu….