Maxence Fermine - Le violon noir (p.45-46)
... La maison d'Erasmus le luthier était
sans doute la plus ancienne et la plus inconfortable de toutes les demeures de
Venise, mais c'était celle qui possédait l'âme la mieux forgée. Située dans une
ruelle plus basse que le niveau de la lagune, elle serait sans doute la
première à disparaître le jour où Venise serait engloutie.
Erasmus se contentait de peu pour vivre. On aurait presque pu affirmer qu'il se nourrissait de musique. Très vite, il ne put se passer de Johannes.
Erasmus se vantait de posséder trois choses exceptionnelles : un violon noir, au son étrange, un échiquier, qu'il qualifiait de magique, et une eau-de‑vie hors d'âge. Le vieil homme était en outre doté de trois dons exceptionnels : il était sans conteste le meilleur luthier de Venise, il ne perdait jamais aux échecs, et c'était lui qui distillait la plus singulière eau‑de‑vie d’Italie. Pour ce faire, il avait installé un alambic dans une arrière‑salle de son atelier. Le matin, il restaurait ou fabriquait des violons, l'après-midi il distillait, et le soir il jouait aux échecs, tout à l'ivresse que lui procuraient ses trois passions.
Jamais on ne l'avait surpris à jeun. Erasmus était toujours pris, que ce fût de musique, de boisson ou de jeu.
Lorsqu'il était ivre, il parlait et parlait sans cesse. Lorsqu'il ne parlait pas de violons, il parlait d'eau-de‑vie. Lorsqu'il ne parlait pas d'eau‑de‑vie, il parlait d'échecs. Lorsqu'il ne parlait pas d'échecs, il parlait de musique. Et lorsqu'il ne parlait pas de musique, il ne disait rien.
C'est là, dans l'atelier du vieil homme devenu son ami, que, tout au long d'une interminable partie d'échecs, Karelsky puisa, soir après soir, l'inspiration nécessaire à l'édification de son œuvre...
Erasmus se contentait de peu pour vivre. On aurait presque pu affirmer qu'il se nourrissait de musique. Très vite, il ne put se passer de Johannes.
Erasmus se vantait de posséder trois choses exceptionnelles : un violon noir, au son étrange, un échiquier, qu'il qualifiait de magique, et une eau-de‑vie hors d'âge. Le vieil homme était en outre doté de trois dons exceptionnels : il était sans conteste le meilleur luthier de Venise, il ne perdait jamais aux échecs, et c'était lui qui distillait la plus singulière eau‑de‑vie d’Italie. Pour ce faire, il avait installé un alambic dans une arrière‑salle de son atelier. Le matin, il restaurait ou fabriquait des violons, l'après-midi il distillait, et le soir il jouait aux échecs, tout à l'ivresse que lui procuraient ses trois passions.
Jamais on ne l'avait surpris à jeun. Erasmus était toujours pris, que ce fût de musique, de boisson ou de jeu.
Lorsqu'il était ivre, il parlait et parlait sans cesse. Lorsqu'il ne parlait pas de violons, il parlait d'eau-de‑vie. Lorsqu'il ne parlait pas d'eau‑de‑vie, il parlait d'échecs. Lorsqu'il ne parlait pas d'échecs, il parlait de musique. Et lorsqu'il ne parlait pas de musique, il ne disait rien.
C'est là, dans l'atelier du vieil homme devenu son ami, que, tout au long d'une interminable partie d'échecs, Karelsky puisa, soir après soir, l'inspiration nécessaire à l'édification de son œuvre...