AL-JOUNDI Darina - Le jour où Nina Simone a cessé de chanter (p.127-128)
... J'ai connu alors Ramzi, il avait vingt-six ans, il était musicien. Il avait un petit appartement à Hamra. Nous étions tout le temps ensemble, la guerre était là, mais on ne la voyait plus, insensibles, indifférents, nous étions dans une perpétuelle overdose de violence. insensibles, mieux nous étions en manque des endroits chauds, des coins dangereux, on courait vers les balles comme les papillons vers la lumière. Par peur de rencontrer Abed, je ne me séparais jamais de mon revolver, un Smith & Wesson. C'était le mois d'avril, les arbres bleus de Beyrouth étaient en fleurs. J'étais chez Ramzi, avec Hussein, un jeune étudiant qui attendait son visa pour émigrer aux États-Unis. Nous avions pris trente grammes de coke en quarante-huit heures, sans dormir. Un disque de Janis Joplin passait en boucle.
Ramzi jouait de la guitare, tard dans la nuit, il a eu une illumination:
- Et si on jouait à la roulette russe?
J'ai ri et j'ai accepté tout de suite. Hussein n'était pas partant, mais il ne voulait pas se dégonfler devant nous. Ramzi était fébrile :
- Voici donc la règle, celui qui perd laisse sa dose au suivant, et même si quelqu'un meurt, il faut continuer de jouer. Le hit est plus important que la mort.
Ramzi a pris mon revolver. Il chantait I Will Survive. Ses yeux brillaient , il a pris sa dose de free base. Lentement il a posé le canon sur sa tempe. Je le regardais, fascinée...
Ramzi jouait de la guitare, tard dans la nuit, il a eu une illumination:
- Et si on jouait à la roulette russe?
J'ai ri et j'ai accepté tout de suite. Hussein n'était pas partant, mais il ne voulait pas se dégonfler devant nous. Ramzi était fébrile :
- Voici donc la règle, celui qui perd laisse sa dose au suivant, et même si quelqu'un meurt, il faut continuer de jouer. Le hit est plus important que la mort.
Ramzi a pris mon revolver. Il chantait I Will Survive. Ses yeux brillaient , il a pris sa dose de free base. Lentement il a posé le canon sur sa tempe. Je le regardais, fascinée...